mh, remise à sa place... (C'est d'actualité non ?) (samedi, 28 mai 2011)

espace.jpgTout a commencé lorsque j'ai voulu mettre de l'ordre. Une belle initiative de jours d'été n'est-il pas ?
Il fallait que je gère mes "tas", de papiers, de documents divers et variés, avec la même conviction que j'enseignais aux autres à les ordonner.
Je me suis assise, j'ai regardé autour de moi quand une évidence soudaine m'a frappée: Pas de place.
Non que je vive dans un bouiboui infâme, mais chaque objet, chaque meuble chaque livre sont calé pour rendre la vie agréable en cet endroit à une seule et unique personne et peut-être deux occasionnellement.
Comme j'avais l'humeur badine, j'ai mentalement noté:

que je vivais dans un endroit ou j'avais la place pour vivre seule ou très petitement accompagnée.

que la majeure partie de mon espace était, certes joliment, mais grandement occupé par des livres

qu'à étendre le sens du mot "place" dans toutes ses dimensions, je comprenais mieux et avec une stupéfaction grandissante les quelques moteurs principaux de la vie.

J'allais sans doute trop vite en besogne, mais j'avais l'impression que, comme à la fin d'une histoire, une grande partie des "fils" se rejoignaient en une logique imparable.

Un homme dans le poste, parlait de ses quelques amis écrivains qui vivaient encore et toujours dans des chambres d'hôtels, dans des chambrettes, malgré le succès et les années.
Je pensais à la petite place que ses artistes occupaient dans le réel et aux montagnes de mots et d'histoires qu'ils bâtissaient dans l'irréel.
Je pensais à la place que nous occupons où, que nous ne savons pas parfois occuper dans notre vie, auprès de nos amis, de nos amours, choisissant inconsciemment ceux qui n'en ont pas pour nous ou ceux qui nous en laisse trop. La place professionnelle aussi que l'on se refuse et que d'autre savent sans peine investir.
Je pensais à la place que les rêves prennent si souvent. Je pensais comme j'aimais cet outil, celui où vous me lisez à l'instant. Là je tentais de prendre place, avec mes mots, mes pauvres mots et votre étrange présence absence. L'endroit virtuel où je prendrais place, peut-être même celui qui me permettra d'apprivoiser une place dans le réel. Celui où nous sommes nombreux à avoir tendance à nous plonger, nous noyer. Cet océan virtuel, plein de possible. Cet espace d'échange aussi ouvert que les rêves, qui nous met en relation avec des personnes, près de nous, à des milliers de kilomètres. Les relations d'amitié qui peuvent s'y tisser où le rêve de l'autre prend tellement plus de place que sa réalité.
Ce monde sans risque.

N'est-ce pas l'observation de nous même de nos grandeurs et de nos misères qui nous permet d'avancer toujours ?

Gardant le mot place dans ma tête comme une litanie, me venaient des flots de place, les places que l'on nous apprend à garder enfant, celles où l'on parvient à se nicher y décelant la notre, les places face à l'envahissement de l'autre ou des autres.
Rester à sa place.
Prendre place.
Se placer
Exercice simple, regarder autour de soi l'espace que nous habitons. Y conjuguer le mot place.
Ces êtres qui prennent de la place, par leur agitation, par leur voix par l'occupation de leur corps dans l'espace, par leurs maux par l'agitation, l'énervement, la tension qu'ils engendrent. Ceux là même qui ne se rendent pas compte de leur façon d'envahir.
Ces autres qui ne savent ou ne peuvent défendre et revendiquer leur place.
La place des vivants, la place des morts, sur la planète, dans nos vies dans l'espace de notre conscient et de notre inconscient.
La place que je prends là, à vous écrire.

Quelle place donc prenons-nous chacun dans la vie de l'autre ?
Quel envahissement imposons-nous, à nos amis, à nos aimés à nos enfants, à nos parents ?
Pourquoi certains d'entre nous, pensant qu'ils n'ont pas de place dans le réel dans l'amour des autres se réfugient et s'étendent avec une énergie folle dans l'irréel, dans le virtuel, dans l'alcool, dans la fuite, dans l'obésité…

Je salue amicalement tous ceux qui prennent place dans leur vie, avec leurs œuvres de papiers, de tissus, leurs œuvres de sons, avec leur corps maîtrisé et leur souffle.

Je salue l'ami du bout du monde qui a su prendre son intangible place, transformant une enfance difficile en l'espace des notes qu'il créait, qu'il projète pour rien, n'ayant réussi à s'accorder aux rythmes de l'amour que par la grâce de la musique.

Quelle est votre place ?

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