Je n'ai pas dit tout ce que je savais de la beauté.
Je n'ai jamais vu plus belle créature féminine que cette persane, devant la gare Montparnasse, il y a des années. Cette beauté terrible, cette femme d'une douceur inconcevable aux yeux profonds et graves, aux traits si fins. Que portait-elle à part un enfant dans son ventre ? Qu'enfantait-elle ? Qu'avait-elle vue ? D'où venait-elle, inconsciente de sa beauté ?
Je n'ai plus aperçu si bel homme que celui-là assis dans le métro, dont j'ai croisé de longues minutes le regard. "L'homme avec qui il me plairait de vivre" ai-je pensé. Je ne suis pas allée à sa rencontre, pourtant imbécilement persuadée qu'il était "lui".
Je n'ai pas senti plus d'amour que pour le triste ne sachant pas aimer. Je n'ai pas senti se déployer plus grandes les ailes de la certitude d'aimer, cette calme certitude ce plus beau de soi-même, cette source.
Je n'ai pas reçu apaisement plus doux à comprendre enfin que l'amour se reçoit aussi.
La route est longue. Je roule je roule. Je n'ai pas l'air de bouger. Je frappe à des portes qui n'ont pas l'air de s'ouvrir. Je pourrais renoncer, mais je ne renonce pas. Je vis et si je m'en demande plus souvent la raison, je lutte davantage pour ne pas me blesser
Je ne dirais jamais tout ce que je sais de la beauté.
Je crois qu'elle est la frontière de ce monde.
mh,