— T’avais dit qu’on arriverait les premiers.
— Hein ?
— T’avais dit qu’on arriverait les premiers !
— Qu’est-ce que j’en sais si on est les premiers ou les derniers ?
— Oui, mais t’avais dit…
Je la débarque au premier virage. Elle m’ennuie.
— Descends.
— Quoi ?
— Prends ton sac, tu me fatigues.
Je ne la regarde pas. Dans cinq secondes, elle pleure… Ça y est, elle pleure.
— Jéro, t’es pas drôle.
— …
— Jéro, tu ne peux pas me laisser !
— Tu es dans une grande ville. Tu demandes la gare, tu rentres chez toi tranquillement.
— Mais Jéro, on partait en vacances tous les deux… Qu’est-ce qui te prend ? Je ne dis plus rien je fais ce que tu veux…
Je les connais par cœur les mimiques de mademoiselle, les réactions de mademoiselle, les larmes de mademoiselle, les remarques de mademoiselle. Elle renifle, elle a des sortes de petits gémissements. Elle n’ose pas se mettre en colère. Une pancarte blanche, émergeant d’un eucalyptus magnifique, indique la gare. Les rues sont pleines de monde. À six heures du matin effectivement, j’imaginais qu’on arriverait les premiers.
...

La semaine dernière, chassant le bouquin dans la librairie de mon quartier, je tombe sur un gros poche de chez poche : « Je sais cuisiner » de Ginette Mathiot. Dessus il est écrit « Le livre culte de mère en fille ». Comme je suis crédule, j’ai acheté la somme, ainsi que, toujours en poche et d’égale épaisseur, le « SOS cuisine » de Jean pierre Coffe. En les feuilletant, j’ai noté quelques similitudes. Je suppose que Jean Pierre Coffe fut adepte du dit culte, ou du moins qu’il en eut un jour connaissance. N’étant pas forcément à l’aise avec la notion de dévotion, je suis cependant curieuse des savoir-faire de chacun. J’ai connu dans mon enfance une énorme bible gastronomique à couleur pourpre plus impressionnante qu’un petit poche. Je me sens donc à même d’attaquer sans peine et d’adapter à mon usage personnel les cultes et astuces des uns et des autres.